Malawi : la planification familiale comme solution pour ralentir l'explosion démographique
Traduction d'un article de l'IRIN Blantyre 31 Janvier 2013 (IRIN) - La salle d'attente de la clinique Nkhata Bay (Nord Malawi) ressemble à une pouponnière, avec des dizaines d'enfants qui courent dans tous les sens et tirent les jupes de leur mères. En moyenne, chaque femme est à la clinique avec 4 jeunes enfants. Parmi elles il y a Lillian Nasenda, qui, âgée de 45 ans est enceinte pour la 8ème fois. Elle a quitté l'école, adolescente, suite à sa première grossesse. « Je ne peux contrôler ce pour quoi Dieu m'a crée : en tant que femme, je suis faite pour avoir des enfants. Mon mari m'interdit aussi formellement d'aller voir la planification familiale, et d'adopter leur méthodes ». Ces points de vue sont monnaie courante dans un pays où les femmes ont en moyenne 5,8 enfants. Selon une étude de l'Institut africain pour la politique de développement et de Population Action International, la fécondité du Malawi n'a d'ailleurs que peu baissé depuis 40 ans, puisqu'elle était alors de 7,2 enfants par femme. Cette étude note que la population du Malawi est passée de 3 millions en 1950 à 15 millions en 2010, et devrait atteindre 50 millions en 2050. Les auteurs avertissent que la croissance rapide de la population augmente l'insécurité alimentaire, la dégradation environnementale et la pauvreté.
Le taux élevé de fécondité soumet les femmes à des risques importants : le Malawi est l'un des pays ayant le plus fort forts taux de mortalité maternelle dans le monde. En moyenne, 800 femmes du Malawi meurent chaque jour de problèmes liés à la grossesse, selon l'institut Aspen Global Leaders Council for Reproductive Halth (GLC), qui a récemment envoyé une délégation dans le pays pour attirer l'attention sur la diminution du financement pour la santé maternelle et la planification familiale. Globalement, le financement de la planification familiale dans les pays en développement, en proportion de l'aide au développement de la santé, a chuté de 8,2% en 2000 à 2,6% en 2009, selon GLC. Joyce Banda, Président du Malawi, a lancé en 2012 une initiative sur la santé maternelle et la maternité sans risque, qui vise à assurer l'accès universel aux services de santé en matière de reproduction, mais plus de dotations seraient nécessaires.
Amélioration de l'accès, et acceptation Malgré ces insuffisances, le Malawi a fait des progrès significatifs dans le développement des services de planification familiale. Une étude récente de l'Agence américaine pour le développement international (USAID) a constaté que le pourcentage de femmes du Malawi et de leurs partenaires qui utilisent la contraception est passé de 7% en 1992 à 42% en 2010. Les auteurs ont attribué cette forte augmentation aux efforts conjugués du gouvernement, des ONG et des bailleurs de fonds internationaux, qui, outre l'accès aux services de planification familiale, ont également contribué à créer une «culture de l'acceptation» au niveau des communautés. Plus de services sont nécessaires La demande croissante de la planification familiale ne va pas cependant toujours de pair avec la disponibilité des services, surtout, dans les zones rurales. «Au Malawi, il existe des différences énormes entre les zones urbaines et rurales en ce qui concerne les services de planification familiale», a déclaré Rodney Kalanda, qui dirige une clinique dans la capitale Lilongwe. «Le grand éloignement des centres de santé, les tabous traditionnels, les valeurs qui découragent la planification familiale et la pauvreté ne sont que quelques-uns des facteurs qui empêchent les femmes d'accéder aux services de planification familiale.» Martha Kwataine, directeur du Réseau de l'égalité en santé du Malawi, une ONG locale, a elle aussi cité la pauvreté comme un obstacle. Beaucoup de femmes qui dépendent économiquement de leur mari ne peuvent prendre leurs propres décisions, même celles concernant leur santé reproductive, a-t-elle dit. Et là, où les services de planification familiale sont disponibles, le choix des méthodes est souvent limité. La plupart des cliniques du secteur public ne proposent que des injections hormonales (Depo-Provera), des préservatifs et des pilules contraceptives. Les ONG fournissent plus de choix. Par exemple, Banja La Mtsogolo (BLM), une antenne de Marie Stopes International, au travers ses 31 cliniques, propose des méthodes de longue durée ou permanentes, comme les dispositifs intra-utérins, les implants, la ligature des trompes et la vasectomie. Ces services mobiles sont gratuits ou très accessibles. BLM propose également une contraception d'urgence. Les données de l'Enquête démographique et de santé 2010 Malawi ont montré qu'un tiers de toutes les ligatures des trompes ont été réalisées par BLM. Cependant, la ligature des trompes n'est pas disponible dans la plupart des cliniques et des hôpitaux visités par IRIN : ils ont indiqué qu'ils manquaient de personnel qualifié pour effectuer l'opération. Plusieurs femmes interrogées ont déclaré à IRIN qu'elles désireraient des formes permanentes de contraception, mais sont contraintes d'opter pour des injections ou la pilule parce qu'elles n'ont accès qu'aux dispensaires publics. Harriet Juma, du district de Zomba, dit que la pilule n'est pas pratique car elle doit être prise tous les jours. Elle doute des préservatifs car ils sont contrôlés par les hommes. Mariée, un enfant, Juma gère la taille de sa famille en utilisant des injections hormonales. La très jolie Kapyepy, également de Zomba, a trois enfants et utilise des injections depuis 1998. «Mon rêve est de fonder une famille dont je peux m'occuper, sans être écrasée de travail», a t-elle dit.
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